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Visions

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4 août 2007

Retour

Le café pisse plus qu'il ne s'écoule dans le gobelet publicitaire craché par l'imposante machine. Les odeurs s'additionnent. La sueur, les parfums, les viennoiseries, le tabac froid, les urinoirs et encore bien d'autres... Mais même en posant le nez au-dessus du verre, pas d'odeur revigorante de café.

Paul plonge les lèvres dans le liquide trop chaud. Il grimace mais continue à s'injecter le liquide dans le gosier.
Le verre est vite finie et jeté dans la corbeille. Paul semble alors découvrir les lieux. Un camionneur sort des toilettes, la sueur perlant au-travers du maillot de corps. Deux familles errent entre les étals, une troisième déjeune près du bar. De jeunes gens pressés entrent et sortent, se croisent dans une chorégraphie très étudiée sans jamais se bousculer.

Paul entre dans les toilettes. La blancheur du lieu tranche avec l'agression d'odeurs fétides. Il passe les mains sous le robinet automatique et laisse le filet d'eau tiède glisser entre ses doigts.

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3 juin 2007

repas albane

Petit repas au restau pour le départ d'albane à chiendemikeycity
Cliquez sur les photos pour les agrandir

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18 janvier 2007

Quoi qu’il en coûte… (2e partie)

Première partie ici...

Le travail l’accapare. Des soirs, des nuits éclairées juste par la lumière bleutée de l’ordinateur. Elle ne voit plus personne. Elle avance droit devant, prête à avaler toutes les embûches, à les digérer et à les transformer avantageusement.
Elle fourmille … Les idées s’entrechoquent.

La voix est là, bien sur. Elle l’aiguille, l’encourage, l’acclame, la soutient. C’est sa seule compagne.

Elle met tout dans ce dossier, toute sa vie, son énergie, sa fougue, son âme, quitte à la perdre. Les concurrents vont être bons. Il faudra qu’elle soit meilleure, La meilleure. Simplement supérieure. Elle arrive la première au bureau, repart quand les femmes de ménage arrivent… Les week end défilent sans loisir, sans plaisir, l’ordinateur portable toujours à porter de main.
Elle dort peu, mange peu. Elle perd du poids, près de cinq kilos en deux semaines. Rapidement les cachets prirent la place des véritables repas. Et juste du travail, du travail. Comme une drogue qui inonde ses veines. Une douce chaleur d’abandon, une folie de travail.

Une préparation acharnée, quitte à se négliger, à ne plus vivre qu’avec la voix qui vous dit d’avancer, quoi qu’il en coûte.

Vint le jour de la présentation du projet. Le grand jour. Son jour. Elle est tendue. Levée aux aurores. Tout reprendre, encore une fois, répéter dans sa tête, les arguments, exemples, force de frappe et autres coups de théâtre qui feront peser la balance de son côté. Elle est prête. La voix lui dit tout, la coache.
La route est tracée. Elle est la meilleure, elle va gagner. La voix lui dit, elle la croit.

Elle arrive au cabinet. L’angoisse la terrasse de surprise. Ses tempes s’humidifient de sueurs glacées. L’ascenseur. Dernier regard dans la glace, une mèche invisible à remettre. 2 étages et c’est le grand saut. Le silence.. Pesant. Qui obstrue toutes pensées. Les portes s’ouvrent. Que le show commence.

Le comité directeur du cabinet est déjà installé dans la grande salle de réunion. Elle est accueillie chaleureusement. Ils plaisantent, discutent, mais elle sait très bien que s’il y a le moindre problème ces crotales la disséqueraient sans sourciller.

Elle sort de sa mallette ses documents, commence à installer des dossiers, chemises, transparents...
Elle est confiante, sûr d'elle. Ou plutôt la Voix est sûre d'elle, car Brigitte se cache derrière son apparence, son masque, et hurle sa peur en silence, faisant résonner tout son être.

10h30. l'heure est venue. La délégation de la Kriss Company arrive. Elle est composée de cinq membres. Une femme, quatre hommes. Ils sont s'habillés de la même manière, des clones. Les mêmes couleurs de costumes, la même coupe, même pour la femme, la même chemisette. Leur façon de marcher, de parler sont identiques, formatés. Le dernier à entrer dans la salle fait exception. Il porte dans les quelques 130 kilos de graisse qui remplisse l'attirail du stéréotype de l'américain ayant réussi dans les affaires : un complet criard, le chapeau de cow-boy vissé au crâne et le cigare cloué au bec. Une vraie parodie ambulante. En le voyant Brigitte écrase un fou rire entre ses dents.

« Ce n'est pas le moment de craquer, s'écrie la Voix. On a trop travaillé dur, pour se laisser distraire par un ricain bourré de tunes, aussi caricatural soit-il. Maintenant montre-leur qui tu es, qui nous sommes... On n'est pas là pour s'effondrer. Vas-y fonce ! Et Gagne ! Quoi qu'il en coûte... »

Après les palabres d’usages, ils s'installent autour de la grande table. D'un côté les membres de la direction du cabinet, de l'autre la délégation de Kriss company. Et en face d'eux, avec son projecteur et ses dossiers, Brigitte, seule. Enfin, seule... pas tout à fait.

Elle démarre.

lh30 de présentation sans temps mort. La Voix est là, durant toute la présentation. C'est elle qui lui souffle les mots, les gestes. Présente derrière chacune de ses phrases. Elle exalte. Le meilleur travail qu'elle n'a jamais conçu. En fait, la Voix semble encore plus sûre que Brigitte elle-même.

Quelques questions piégeuses fusent à la fin de son intervention. Ce sont les clones qui interviennent à tour de rôle. Le gros homme reste à l'écart, en spectateur. Elle répond avec facilité, tranquillement, rajoutant même des brins d'humour. Elle a tout prévu. Tout. La Voix a pensé à tout. Chaque embuscade se transforme en triomphe, en argument en sa faveur, en leur faveur.

« C'est dans la poche. C'est sûr. Tu les as emballés. Je suis fière de toi. Très fière. »

Et la Voix peut l'être. Sa protégée vient d'accomplir un véritable sans faute.

« Merci de votre brillante prestation, Mademoiselle. Je pense que nous pouvons nous retirer à présent. Nous vous ferons parvenir notre réponse sous 48 Heures. »

C'était la femme qui venait de parler. Sa voix se voulait sèche et sans émotion, mais on pouvait y lire, entre les souffles, l'emballement pour le projet, sûrement le meilleur qu'ils aient vu dans les différentes agences prospectées.

Les délégués de Kriss Company se lèvent. Mr Verfeil les accompagne. Ils vont déjeuner. Rituel classique pour accommoder les grandes huiles.
Brigitte reste immobile, à côté de ses panneaux. Liquéfiée par l'émotion, bien
masquée derrière son masque professionnel. Elle reprend peu à peu son souffle, son calme. Elle se sent seule aussi. Comme un soldat, dernier de sa compagnie, qui jette un dernier regard sur-le-champ de bataille rendue désert par la fin des hostilités mais qui garde les traces de toutes les atrocités qu'il vient de subir.

La délégation passe prés d'elle. L'homme opulent, discret jusque là, la regarde de bas en haut, l’inspecte du regard. Il avance et susurre quelques mots à Verfeil.

« Mais bien sûr, comme il vous convient. »

Verfeil s'approche alors de Brigitte :

« Vous nous accompagnerez pour le buffet, j'espère. Mr Kriss voudrait vous avoir à sa table. »

« Mr Kriss. Le grand big boss, la grosse baleine nous veut à sa table. » La petite Voix de Brigitte faillit prendre le dessus, parler à la place de Brigitte.

''Mais bien sûr qu'on va y aller. Et plutôt deux fois qu'une. Là voilà notre chance, tu entends. Ta porte d'entrée pour les cimes se dessine enfin''

« Oui, lâche-t-elle enfin, avec un grand plaisir. »

(à suivre...)

17 janvier 2007

Quoi qu’il en coûte… (1e partie)

Quoi qu’il en coûte…

«  La réussite est à ce prix. Et tu es faite pour ! »

La petite voix résonne dans son crâne. Cette voix ne l’a jamais quittée, toujours présente… Un guide sans tous ses choix, face aux difficultés. Elle l’a toujours poussée, toujours plus loin.

Mais n’est-elle pas allée trop loin ? Ne lui a -t-elle trop demandé cette fois ?

« Tu as fait ce qu’il fallait. Je suis fière de toi. »

La voix ! Elle a raison. Forcément ! Elle a toujours eu raison. C’est la voix de sa raison, de la réussite : douce, forte, fonceuse, rassurante. Elle s’est installée dès l’adolescence et l’a dirigée dans ses choix depuis, les bons. C’est elle qui l’avait aidée pour les études, la motivant juste avant les oraux, la bougeant pour les révisions… C’est encore elle, bien présente, qui lui soufflait quoi dire, comment le dire. Et maintenant, lâchée dans le monde du travail, celui des affaires, la petite voix se régale…

Pour la première fois, elle doutait d’elle, de ses conseils.

Elle sort du lit juste enveloppée du drap.
Une douche ! Voilà ce dont elle a besoin. Une douche. Se laver, de tout cela, de cette nuit, cette pression… Se laver de suite !

Et pourtant, elle devrait être contente ! Elle l’a eu son contrat. Le fameux contrat qu’elle attendait. Celui qui vous ouvre toutes les portes, de tout les bureaux… Celui qui allait la porter haut, la propulser dans les sphères privilégiées de sa profession, le signe de ceux qui savent avancer, quoi qu’il en coûte.

Elle pousse la porte blanche, lâche le drap et se faufile dans la cabine. Au contact de l’eau, elle a d’abord un léger recul, puis accepte finalement le flot chaud ruisseler sur son corps.

Elle n’arrive pas à être heureuse. Elle s’est pourtant battue des mois pour y arriver, elle y est parvenue… quelque chose cloche…la voix a eu tort.

Dés qu’elle avait eu le dossier en main, elle a su que sa chance se présentait. Voilà 6 mois qu’elle avait débarqué dans cette entreprise. Six mois d’affaires classiques, de promesses de gros dossiers confiés bientôt, un jour, quand elle aurait fait ses preuves et que, peut-être…

Elle ne veut pas d’une promotion. Non ! C’est pour les petits, les manges-peu… Elle est venue ici pour devenir une associée, oui faire partie des patrons, de ceux qui décident… un minimum pour satisfaire la petite voix.
Son ancien patron n’avait pas voulu comprendre ça. Stupide ! Alors, elle s’est vendue aux plus offrants. Petit tour des cabinets de la ville, elle fut vite courtisée. Elle est bonne dans sa matière. La meilleure ! Et puis, elle ne vient pas seule. Une partie des dossiers « empruntés » à son ancien poste l’accompagne. Normal !

Dire que son ancien boss marche simplement sur la confiance… un dinosaure. La confiance, dans les affaires comme ailleurs, c’est une denrée obsolète … Il faut tricher pour gagner. Il faut mentir, corrompre. La voix la bien instruite sur le sujet. Elle suit donc cette pratique, s’y complet. Fidèle dans l’art de la trahison.

Monsieur Marc, le grand sup. de Verfeil & associés, l’a donc conviée dans son bureau. Six mois, c’est l’heure du premier bilan. Il l’a d’abord félicitée pour le travail déjà accompli, se félicitant lui-même pour une aussi bonne recrue, une battante. Puis, il lui sorti le laïus tant attendu : « vous avez un avenir doré chez Verfeil. Une grande carrière s’ouvre à vous. Mais les chances comme celles-ci ne s’offrent pas toujours. Il faut savoir les saisir. Les prendre à bras le corps… et peut-être, qui sait, ce serait elle bientôt assise dans ce fauteuil et racontant cela à un petit nouveau… » Il rie. Un rire faux, puant… Elle l’accompagne dans son rire, mais c’est la voix qui rie en elle. Pour sûr qu’elle allait le supplanter cet être sans saveur…

« Cette chance, là voila ! »

Il pousse une épaisse chemise cartonnée et la regarde sévèrement.

« Il s’agit d’un gros, d’un très gros dossier. De quoi faire vos preuves. Nous misons beaucoup sur ce cas. Nous pensons que vous êtes la mieux armée pour nous faire réussir. »

Elle ouvre la pochette et lance des regards sur les papiers de présentation. Papiers glacés, plaquettes… tous à l’effigie de la Kriss Kompany.

« Ils arrivent sur le marché national. C’est un énorme budget. Ils attendent de nous que nous fassions le maximum pour leur intégration rapide sur le marché national et ensuite ils partiront à la conquête du marché continental. Vous comprenez l’importance de notre travail. Une réussite avec nous et c’est sur l’Europe que nous travaillerons. Vous êtes seule maître à bord. Nous vous les confions… Il va de soit que l’échec nous est interdit. »

« Ce sera réussite ! »

Elle agrippe le dossier et sort. Tous les grands cabinets de la ville doivent être dans la bataille. La voix exalte. Une éruption dans le volcan de son âme. Elle l’a sa chance.
Elle va rentrer dans l’arène pour gagner, à tout prix.

La voix exalte. Une éruption dans le volcan de son cœur. Pour sûr qu’elle allait gagner, pour sûr qu’elle était la personne parfaite pour ce travail, pour sûr qu’elle ne laisserait rien ne lui empêcher de réussir enfin.
Son cœur cogne, frappe.

(à suivre...)

7 janvier 2007

Premier boom

« Il te reste d’autres cartons ? »

« Non, c’est le dernier. Tout est là. »

Il dépose le carton dans l’entrée submergée de monticules non identifiables.

« Pas besoin de plus d’aide, tu es sûr ? Pour déballer ? »

« T’es gentil, mais j’ai déjà trop abusé. Rentre ! Vu l’heure, ta femme doit s’inquiéter. »

Il raccompagne son ami sur le perron et le regarde partir. Enfin seul… Il va falloir ranger un peu, au moins pour trouver un espace pour dormir dans ce nouvel appartement. Une nouvelle vie commence. La rupture a été difficile, comme chaque nouveau départ. Il a du laissé derrière lui un amour qui ne le voulait plus, une vie révolue, une maison disparu dans les cendres du destin.

 

Il déplace deux cartons, pousse le troisième, ouvre le quatrième, puis un cinquième. Deux heures durant il déballe, range, tris, jette, nettoie…

Entre ses mains passent des livres, des bibelots, quelques habits, beaucoup de papiers, encore des livres. De l’un d’eux, des photos s’échappent et tapissent le seul bout de parquet qui arrivait à exister sous les amas d’affaires à ranger.

Il les ramasse rapidement. Il ouvre un tiroir pour les enfouir dans cette cache où elles risquent de ne pas ressortir, peut-être jusqu’au prochain déménagement. Mais la curiosité attire son regard sur ces bouts de vie passée.

Un groupe réunit au bord d’une petite rivière. Il est au centre. Autour de lui des amis d’enfance. Que sont-ils devenus ? Ils sont restés avec ses souvenirs d’enfance, derrière lui. Il n’a plus eu de nouvelles, la vie et le temps ont fait son œuvre.

Les photos suivantes sont de la même époque. Un sourire vient dessiner son visage. Il enfuit les photos une par une dans le tiroir, mais la dernière il ne peut la ranger. Il la regarde un long moment.

Depuis combien d’année ne l’avait-elle vue ? Il ne se rappelait même pas l’avoir. La photo n’est pas nette. On distingue le fond d’une pièce de ferme. Une grange peut-être. Des ballons sont accrochés aux murs, des rayons lumineux colorés transpercent l’obscurité.

La mémoire n’est qu’une balle folle. C’est au moment où on ne s’y attend plus qu’elle vient vous frapper le visage. Il se souvient.

Il s’agit d’une fête, l’une de ses premières. Il y a si longtemps de ça, il a l’impression qu’il s’agit d’une autre vie. C’est la grange des Pressetoc, proche de son village natal. La fille devait arroser ses 14 ans ce soir là. Mais comment s’appelait-elle ? Perrine ou Pascale ? A 15 ans, il était l’un des plus grands, et le préposé à la musique. Et il se prenait pour un vrai crack, le DJ de la campagne, avec une trentaine de disques et deux chaînes hi fis.

Tout était prêt. On avait passé l’après midi à tout préparer. C’était la première vraie boom de toute la petite bande du village.

Le buffet était composé de pizzas surgelées et de gâteaux maisons, d’un grand nombre de jus de fruits et de quelques bières bues en cachette avec deux cigarettes vite crapotées. De vrais petits mecs et de jeunes gonzesses qui jouaient aux grands, ou qui le devenaient un peu. On dansait, on dragouillait, c’était léger.

Lui, il préférait s’occuper de la musique. Il aimait choisir la musique et entendre les bruits de satisfaction lors du bon choix au bon moment. Et pour le reste, il se trouvait trop pataud et restait caché derrière de la timidité. Il n’avait pas l’étoffe du king du dancing, et encore moins du dragueur de la cour de récré.

Il faisait danser et rire les autres. Ça lui convenait.

Mais ce soir ce fut un peu différent. Elle était venue le voir, plusieurs fois. Elle s’appelait Maude. Au début, elle demandait un disc ou un autre. Puis, elle restait là, à danser près de la sono improvisée. Elle ne parlait pas. Elle attendait.

Mais lui ne comprenait vraiment pas ce qu’elle pouvait attendre.

Il venait de passer du rock depuis un moment. Il fallait changer d’ambiance, de style. Le quart d’heure slow s’imposait. Il mit le disque et s’assit sur la chaise.

« On est tranquille pour un moment. »

Maude le regardait, l’épiait. Il le sentait et voulut lui répondre d’un sourire, mais il se transforma en rictus maladroit. Elle se leva et lui saisi la main. Sans un mot, elle le porta sur la piste.

Il voulait refuser, poliment, reculer et retourner s’asseoir. « mais je ne sais pas dan… »

Elle lui colla les lèvres d’un doigt et s’approcha encore un peu plus de lui.

Tendu comme un poteau électrique se demandant ce qu’il fait là, planté sur le bord de la route déserte, il sentit une main se posait sur sa taille. Puis une autre sur l’épaule. Le parfum de Maude le bouleversait. Il releva la tête et perdit son regard dans des yeux verts troublant de beauté.

Il se laissa entraîner dans le tourbillon de la vie.

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5 janvier 2007

Sabot

Inventer une histoire en regardant un objet (petit sabot de bois)

Elle rentre comme un furie. Claque la porte à son passage. Elle ne fait pas attention aux cris lancés de la cuisine. Elle monte à l’étage et s’écroule sur le lit. De lourds sanglots la remuent. Josy pleure. Les murs renvoient l’écho de ses gémissements.

Martine est inquiète. Elle a vu débarquer sa fille et même ses cris ne l’ont pas arrêtée. Elle sort de sa cuisine et monte rejoindre sa fille. Elle essaye de la prendre dans ses bras mais Josy remue trop. Elle refuse d’être consolée.

« Mais que se passe-t-il ? On t’a fait du mal ? »

« Je ne l’ai plus, maman. Je l’ai perdu. » La voix de Josy tremble de peine. « Je ne pourrais plus jamais être heureuse. »

La mère comprit en un instant. Elle tourna la tête vers le bureau. Le sabot n’était plus là. Celui que Roger avait taillé l’été dernier. Celui dont on a dit que son âme était venue s’y loger pour protéger sa fille.

On ne devrait jamais inventer des histoires pour consoler les enfants à la mort de leur père, elles peuvent être bien plus cruelles que la vérité.

Le soir passe sur cette sombre nouvelle. Les aliments ingérés par Josy semblent sans goût. Plus rien n’a de goût à présent. Rien ne peut la sortir de son chagrin.
Prête à se coucher, en se lavant les dents, elle a eu une vision étrange. Dans le reflet de la glace elle a cru voir un petit objet brun incongru sur le rebord de la baignoire. Elle s’est retournée d’un bond mais l’objet n’était plus sur le rebord. Avait-il été présent seulement dans son esprit ?

Elle se faufile, toujours aussi triste, dans ses draps froids. Une nouvelle fois, elle croit voir le petit objet accroché cette fois à ses rideaux. Il disparaît le temps de se lever et de courir à la fenêtre.

Le sommeil ne vient pas facilement. Elle se tourne, pleure, retourne. Et déjà le matin la réveille. Il est blanc et sans soleil. Silencieux comme la mort.

Josy se lève et descend doucement les escaliers. Mais un drôle de petit bruit venant de l’extérieur la fait accélérer. Elle en manque une marche et se retrouve sur les fesses sur le carrelage froid de la cuisine.
La porte d’entrée est ouverte. Le cruic-cruic étrange provient de la cour. Josy s’approche.

Au fond du jardin, contre le grand prunier, un homme imposant gratte un morceau de bois avec un petit couteau. Les copeaux s’accumulent sur ses pieds. Il lève son visage vers la fille en pyjama.

Josy crie. Des larmes jaillissent en même temps qu’elle se met à courir. Elle court, vole vers cet homme, et au moment de se jeter dans ses bras… elle tombe du lit.

Elle regarde le sol poussiéreux de sa chambre. Des gouttes salées tombent sur le parquet. Son rêve lui revient en mémoire. Un espoir fou lui enveloppe le cœur. Et si…

Elle dévale l’escalier, manque de tomber lourdement. Elle file à travers la cours, se dirige vers le prunier. Et là, sur le petit banc de pierre, son petit sabot l’attend. Elle le prend dans ses mains. C’est lui, c’est sûr. Il lui ressemble comme un frère jumeau en tout cas.

Des nouvelles gouttes de pleurs tombent au sol, mais cette fois elles sont de plaisirs. Elles viennent se mêler à des copeaux de bois fraîchement coupés.

2 janvier 2007

Le pigeon et l’assemblée

Le pigeon et l’assemblée

Petit conte animalier

pigeon

Ce conte est en partie une histoire vraie ayant eu lieu le 06 juin 06, en Chiraquie occidentale…

Lors d’un bel après midi du mois de juin, dans un doux pays fleurant bon la démocratie, un oiseau jeune et naïf vint à s’égarer dans la cage des crocodiles. Pensant trouver un endroit pour reposer ses ailes et installer son corps de plumes pour une douce sieste, le pigeon entra sous le grand dôme de l’antre législatif.

Les étages étaient vides et for confortables. Il délassa ses plumes et s’en alla dans les nuages et les cieux des rêves.

Des hurlements le réveillèrent. Ce n’étaient que Claquements de dents, hululements, bêlements, cris, bruits, tapotements, aboiements, crissements…

Les crocos raidis de la république accompagnés de leurs acolytes à tête de hyène, de poule, d’autruche, de rhinocéros, de poulpe… venaient de prendre place pour leurs joutes habituelles. En effet, ces drôles de bestioles se réunissent plusieurs fois par semaine pour se hurler à la gueule de nombreux mots d’oiseaux puis se réconcilient avec cigares et rires dans les bureaux de l’étage.

Le pigeon sentit ses plumes frissonner. Son bec tremblait au rythme saccadé de la musique démocratique. Il prit son envol comme un nourrisson tombe du nid. Il planait au-dessus de la mêlée politique. Il demeurait invisible aux yeux des fauves et des reptiles. Il profitait de ne point être repéré pour observer un peu l’assemblée et trouver une issue, comprenant aisément que la place ressemblait plus à présent à un traquenard qu’au havre de paix escompté.

Mais ses tentatives furent bien vaines. Par où donc avait bien put-il entrer tout à l’heure ? Etait-ce par cette fenêtre ? Ou bien de cette porte ? Mais tout était fermé à présent. Ce fut un jeune député d’un département inconnu de tous qui le premier remarqua le ballet de l’oiseau citadin.

Il s’ennuyait ferme au milieu des dinosaures bien trop occupés à ronger leurs sempiternels os pour faire attention à ce jeune loup. Le jeune député se demandait bien ce qu’il était venu faire dans cette galère. Lui était entré en politique comme d’autres au séminaire, serti d’une foi mystique en l’homme et en l’art Politique. Il croyait en l’utopie, au possible changement, au poids démocratique. Il suffisait de vouloir pour demain pouvoir. Il avait débarqué au sein de l’assemblée avec l’envie juvénile de tout chambouler, de révolutionner l’appareil de l’intérieur. Dégraissons ce mammouth ! Apportons-lui une nouvelle jeunesse. Oui, la politique est l’affaire de tous et pas d’une élite ‘éna-sienne’… nous pouvons changer le monde si nous le désirons.

Deux ans ont suffi, ont eu raison de lui, de ses illusions, de sa jeunesse. Le jeu politique avait tout broyé et mastiqué puis rejeté. Deux ans et il se trouvait vieux en se croisant dans la glace. Même ses idéaux avaient vieilli prématurément.
Il paressait donc, attendant un monde nouveau qui ne viendrait plus, les yeux perdus dans un horizon qu’il ne voyait plus.

Une forme fila. Avait-il rêvé ? Pourtant il avait bien vu quelque chose bouger là-haut, là où d’habitude il ne voyait que sa petite vie et sa grande inutilité se reflétaient sur les bois et les dorures.
Un deuxième passage. Il put presque suivre la forme des yeux cette fois. Il l’avait vu voler d’un mur à l’autre. Concentrons-nous. Regardons mieux. Là ! Le voilà.

Il vit nettement un volatile aux plumes grises tournoyer dans le faux ciel de ses rêveries. Il reconnut l’espèce et l’envia aussitôt. Il semblait si libre à voler ainsi… Il voulait lui voler sa liberté, soit pour la faire sienne, soit pour la supprimer. « Si je ne suis pas libre pourquoi lui le serait-il ? » Ainsi sont les hommes. Projeter leurs espoirs de libertés sur des animaux qui n’en connaissent même pas le concept. Seul un homme peut voir de la liberté dans la quête de ce pigeon à la recherche d’une sortie. Mais les hommes ont l’habitude de connaître la liberté en cage… n’enferment-t-ils pas leurs animaux de ‘compagnie’…

Le petit député aux dents de lait avait donc un petit secret. Il était seul à voir l’oiseau. Et comme tout secret, il faut le dire à tout le monde. Pour une fois qu’il serait entendu par ces voisins rabougris. A ses cotés, une vieille loutre prenait quelques notes des débats. Où était-ce une liste de course, des mots croisés, une lettre à un ami… quelle importance !
Le petit député pencha la tête vers elle, sans trop se faire remarquer, comme il l’avait si bien appris sur les bancs du lycée pour ne pas que le maître ne puisse le voir. Il montra le tas de plumes argentées en vol.

« Regardez. Voilà le seul d’entre nous qui arrive à passer au-dessus des clivages politiques. ».

Il pouffa de son mot. La loutre ne ria pas. Elle scrutait longuement, abandonnant ses travaux d’écritures. Elle passa le message à son tour. Comme une traînée de poudre cocaïnique, les animaux des travées du fond levèrent la gueule vers l’invité à plumes. Ceux des tranchées du milieu les accompagnèrent, avant que les premiers rangs ne firent de même.

Le brouhaha institutionnel laissa place à l’observation silencieuse.

Les ministres, les animaux les mieux habillés assis en bas de l’hémicycle, se contorsionnaient pour participer à la fête. Seul le président des crocos n’avait encore rien vu. Le président est souvent élu à l’ancienneté, considéré comme plus sage… chez ces bestiaux, la sagesse est proportionnelle à l’âge des artères, du moins c’est ce qu’ils font croire au reste de la jungle.

Donc, seul le président des Lacoste n’avait pas encore compris le manège des grues en train de viser le pigeon. Interrogeant de son grand menton avancé ses collègues sans l’ombre d’une explication, il se résolut à lever à son tour sa lourde tête. Il vit la volaille des villes. Et cela ne le fit pas rire du tout. Ne l’émerveilla pas plus.
Il s’offusqua. Ce n’était pas dans les procédures, pas dans les textes. Il fallait agir, et au plus vite. « Statuons sur l’intrus. Discutons. Rédigeons. Votons. »

Il décida donc de former une commission. Son but : codifier l’avenir de cet empêcheur de causer en rond.

La commission fut formée dans l’heure. Toutes les composantes politiques de l’hémicycle y participaient. Ils s’enfermèrent dans une petite salle surchauffée et se mirent au travail… enfin plutôt, ils discutèrent des heures durant.

Le pigeon se fatiguait. Il se tenait fièrement sur l’une des dorures du décor parlementaire, toisant de son petit bec ce public étonnant et inquiétant. Les crocos, phoques, grizzlis et rhinocéros, dans une file indienne encadrée par les loutres, passaient à tour de rôle pour photographier, téléphoner, imprimer l’animal. Tous se mélangeaient, se bousculaient.

« Il faut prendre une décision ! C’est à vous qu’elle incombe. Nous ne reprendrons pas le travail avant que ce problème ne soit pas résolu. A votre tâche. Vous devenez la priorité des priorités. »
Le grand sage, plus vieux des singes, avait parlé et avait laissé la commission commissionner.

Un grand cerf sans âge présidait cette réunion extraordinaire :
« Chers collègues, le problème est simple. Nous avons pu voir l’intrusion commise ce matin dans le sacro-saint hémicycle de la représentation nationale. Ceci n’est pas tolérable. Je dirai même plus : c’est intolérable. Il montre ostensiblement son oisiveté et met ainsi en danger notre labeur démocratique dont on connaît l’importance pour la survie même de notre si noble nation. On ne peut laisser ce personnage parader au-dessus de nos têtes. Pour le moment aucun drame n’a eu lieu, mais qui peut dire que cela tiendra la journée ?

Ce volatile peut en effet à tout moment piquer sur nous et nous attaquer. Rien ne prouve sa bienveillance. Il est peut-être muni d’appareil d’espionnage téléguidé par on ne sait quel groupuscule anarchiste ou extrémiste religieux. Imaginez demain un pigeon piégé venant attaquer les symboles du pouvoir de notre grand Etat.

Même sans tracer un tableau si funeste, nous ne sommes pas à l’abri d’une défécation for dangereuse mettant en péril nos réputations et ainsi nos réélections futures. L’image de vos vestons tâchés par des coulées blanchâtre diffusée en boucle sur les médias serait terrible. Voyez-vous un candidat aux plus grandes instances se justifier de cette séquence troublante, passant en cycle sur toutes les chaînes d’information continue. Qui arriverait à faire oublier un amas crasseux posé sur son crâne dégarni passant dans toutes les émissions de divertissements et autres zapping ?

Non, c’est intolérable. Je vous le dis ! Nous devons agir. J’écoute donc vos propositions. »

Il s’assit. Par habitude, la basse-cour applaudit le bel homme qui venait de bramer.

Le député ‘écololoco’ à la tête d’autruche fut le premier à glapir.
« Excusez-moi chers confrères, mais il semble que nous soyons les plus à même à répondre. En effet, notre parti est le spécialiste des volatiles en tout genre. Nous sommes tout de même le parti de l’environnement durable, protection des animaux et de tout le reste. Et nous pouvons proposer, moi et mon collègue présent à mes côtés, une proposition avantageuse pour nous débarrasser au plus tôt de l’indésirable. Il suffit de le convaincre que sa place n’est point ici. Parlementons, amadouons-le avec des graines pour commencer puis invitons-le au dehors pour discuter »

« Entièrement d’accord cher collègue, s’empressa de répondre son voisin de parti, mais ne faudrait-il pas mieux lui apporter du maïs ? Ça mange quoi un pigeon ? »

« Du maïs, excusez-moi cher collègue mais vous n’êtes pas entier ? Du maïs ! Vous voulez faire entrer les OGM dans l’assemblée. Et pourquoi pas du riz modifié tant que vous y êtes ! »

« Mais du maïs pour volatile, du maïs bio »

« Du maïs bio, vous me faîtes rire l’ami ! Et vous le ferez venir comment jusqu’au centre de Paris ? Par camion ! Il n’est pas près de venir… »

Et voilà les deux autruches qui s’affrontent du bec comme si seul leur parti existait. Ils s’aboient à la gueule, crient, s’affrontent, se réconcilient, organisent un vote démocratique, arrive à égalité, re-aboient, re-crient, se toisent, recomptent les votes, re-votent, recommencent et finalement partent de la salle pour former deux sections différentes afin de mieux démocratiser leur parti.

Les autres députés regardèrent la scène avec étonnement, effarement. La porte se referma sur les drôles d’animaux écolos et la discussion put reprendre.

Les hyènes se déchaînèrent :
« Mais comment osez-vous discuter d’une telle chose ! C’est pourtant simple. Non seulement le bestiau est entré sans autorisation chez nous, il est donc de fait un oiseau immigré, mais en plus je suis à peu près sûr qu’il n’a pas de papier. On doit faire un exemple ! »

« Mais voyons cher collègue. Un peu de retenue. Une intrusion et vous voulez envoyer les chars ! Il s’agit peut-être d’un pigeon français qui se serait égaré … » lui fit remarquer le camp des Kangourous.

« La formule est facile… encore un pauvre moineau venant des banlieues, victime de la crise et du chômage. Mais réveillez-vous. Ce sont des racailles. Il faut karsheriser TOUS les pigeons de Paris… »

« Mais vous êtes fous. Laissons ce pauvre petit et tâchons de le libérer. »

« Et pourquoi ‘petit’ ? Pourquoi pas ‘petite’ ? Parité cher ami. Il peut très bien être une pigeonne. » S’indigna une chienne en garde.

« Mais où allez-vous… qu’il soit comme ceci ou comme cela, quelle importance »

« Ah ! Si. C’est important. »

« Appelez les CRS »

« Manquerait plus qu’il soit homo le pigeon »

« Faut tout nettoyer !!! »

Le débat s’envenima. Les insultes volèrent. Les noms d’oiseau remplacèrent les possibles solutions…

Le camp des pacifistes, voulant capturer l’animal pour le relâcher, s’opposait à celui des méfiants, voulant juger l’animal voir l’inculper pour son méfait, et au camp plus tranché : « Exterminons-le !  Et vite ! Faisons une loi pour empêcher une nouvelle intrusion dans notre local ! Il en va de la sauvegarde de notre régime. »

En revanche, tous se retrouvaient sur ce dernier point. Il ne fallait pas que cela puisse recommencer. Que les voitures des pauvres brûlent en périphérie, passe encore. Mais être attaqué sur son propre lieu de résidence de travail, s’en est trop pour nos chers représentants. La réplique est donc très claire : un périmètre de sécurité devra être instauré tout autour des bâtiments de la république, et aussi des villégiatures de province. Aucun volatile non autorisé ne pourra désormais franchir les cordons de sécurité sans avoir plusieurs fois montré aile blanche.

Il restait à s’occuper du cas de pigeon récalcitrant qui était pour l’heure en train de salir les dorures de la république par ses plumes et ses ennuis gastriques.

Certains hommes à l’extérieur ayant appris cette nouvelle étonnante militaient, ‘banderolaient’ pour une pure et simple liberté pour l’animal. Après tout il avait le droit de voyager dans les couloirs de la république, comme pour tout citoyen. Mais bon, pas de souci pour les députés, ces personnes là n’étaient pas élues et n’avaient donc pas droit à la parole, alors pourquoi se fatiguer à les écouter.

La solution d’un filet fut approuvée par une certaine majorité. La finalité de l’opération n’était pas encore très claire. Liberté ? Tôle ? On verrait plus tard !

La commission vota, se congratula, se félicita pour tant de sagesse, but à la santé de la bonne solution, puis partit en rang, bien droit, annoncer leurs versions fort différentes aux médias qui se pressaient sur le perron.

Au bout de trente-cinq minutes de flashs crépitants et de micros tendus, les commissionnaires se rappelèrent de la raison de leurs travaux et vinrent annoncer les résultats de leurs discussions.
Les secrétaires et les hommes de sécurités se mirent à la recherche d’un filet assez conséquent pour la capture de Mr le Pigeon. Lui, passant d’une dorure à un siège, du siège à un chandelier, du chandelier à une balustrade, de la balustrade à une dorure, regardait s’animer cette drôle de fourmilière. C’est vrai qu’elle est étrange cette race de bipède. Les voilà se présentant avec de grands attrape-papillons. Oh ! Ils veulent jouer…

C’est donc par jeu que le volatile passa plusieurs fois à proximité des filets et des têtes lustrées de députés. Quel amusement ! Mais plus il prenait du plaisir, plus les hommes s’impatientaient, rougissaient de colère. Et ce n’est pas les caméras venant filmer les nombreux camouflets infligés à nos décisionnaires par un simple bout de volaille qui allait arranger la situation.

C’était trop. Les nerfs lâchèrent. Un jeune homme pressé, celui-là même qui quémandait la mise à mort de l’animal depuis le début de l’affaire, prit une carabine des gardes forestiers présents, gardes ministériels dans le civil, et abattu la pauvre bête d’une balle dans l’œil droit. Sa chute fut lente. Il n’eut à peine le temps de comprendre que plus jamais il ne profitera du soleil sur ses plumes, du roucoulement de son amie.

Le public amassé regarda. Les pacifistes, résignés, rangeaient déjà les filets inutiles. Certains applaudissements fleurirent. Pas nourris, mais présents.

On évacua la bête morte. Après quelques photos prises de cette belle prise de chasse, on jeta l’animal dans une des poubelles de la République. Les crocodiles purent reprendre place. Ils étaient soulagés. Pas une larme ne coula. Ils avaient déjà oublié.

Seul le petit député regardait le plafond de l’assemblée avec nostalgie. N’avait-il pas vu bouger quelque chose là-haut ? Peut-être juste quelques bribes d’un ancien espoir…

31 décembre 2006

lettre au Papa Noël

lettre au Papa Noël

Cher Papa Noël,

Bonjour,

J'ai 6 ans trois quart et je m'appelle Vincent.

J'habite 8 rue des passementiers. Tu peux pas te planter ! c'est entre le magasin d'antiquité et la lutte anti-alcoolique. C'est trop marrant on croise toujours des gens bizarres quand on rentre... Papa, il me dit de ne pas regarder, mais je ne peux pas m'empêcher de jeter des coups d'oeil.

Enfin, tu peux pas te gourer ! Mais je te fais quand même un plan si tu veux. Passeque, j'ai pas compris, l'an passé t'as déconné… t'es pas passé !

J'ai cru que t'étais fâché. Que c'étais à cause que j'avais pas été très sage dans l'année, et que j'avais pas assez aidé papa... Alors, cette année, Z'ai été très sage.

Bon ! Je dis pas. J'ai bien fait une ou deux bêtises… Mais des fois c'est dur de s'en empêcher ! Et j'ai vraiment essayé de faire de mon mieux.…

Puis j’ai été bien plus sage à l’école qu’avant. Mais Mlle Combier, ma maîtresse, ne m’aime pas beaucoup. Elle me pose toujours des tas de questions. Elle me demande toujours si je vais bien, si j’ai appris ma leçon, si je comprends…

Et pourquoi qu’elle demande pas aux autres ?

Donc, je ne te demanderai pas trop de choses cette année... L'année dernière, j'avais abusé avec ma liste. Ma grande soeur s'est moquée de moi et m'a expliqué que tu pourrais rien amener si je demandais trop... et vu que tu m'a rien amené...

Alors, j'ai bien réfléchi, Papa Noël, et voila ma liste :

J'aimerais bien, Papa Noël, que tu amènes pour ma p'tite soeur un TRES zoli cadeau.

Elle s'appelle Zaza. Elle a 5 ans et elle est très jolie... Enfin, moi je sais pas, mais tout le monde autour de nous le dit qu'elle est jolie avec ses couettes... alors si tout le monde le dit c'est que ça doit être vrai, hein ?

Elle m’embête de temps en temps, c’est vrai. Elle pique mes jouets et ça m’énerve. Papa prend toujours sa défense et me dit que c’est à moi se lui prêter mes jouets, vu que je suis plus grand. C’est dur d’être grand…

Pour Zaza j'aimerais que tu lui amènes tout de même un SUPER cadeau... une BARBIE !

Attention, pas n'importe quelle Barbie. La meilleure !

Barbie Divorcée !

Ouais, passeque ‘Barbie divorcée’ est livrée avec la voiture de Ken, la maison de Ken, la télé de Ken, le frigo de Ken et tous les accessoires... et la pension alimentaire...

Pour mon grand frère, il s'appelle Anthony, j'aimerais petit papa Noël que tu lui amènes un punching-ball. Comme ça il tapera dedans tous les soirs et il arrêtera peut-être de taper dedans moi... Passeque moi, j'en ai marre... Et quand il sera pas là, j'irais m'entraîner et je serais plus fort que lui...

Et pis, petit papa Noël, il y a aussi ma grande grande sœur : Christine. Elle, elle est vieille ! Elle a déjà quinze ans... Mais elle est super gentille, Christine. C'est elle qui me raconte des histoires avant de m'endormir. C'est elle aussi qui me console quand je suis triste ou quand j'ai peur.

Alors, pour ma super soeur Christine, petit papa Noël, il lui faut un cadeau bizarre... Moi, je sais pas trop ce que c'est exactement, mais je l'ai entendu en parler avec ses copines que maintenant elle serait obligée d'en avoir...

Alors je me suis renseigné, et j'ai regardé les pubs à la télé... ça a l'air génial ce truc !... Ouais passeque ils ont dit à la télé, qu'avec ça tu peux aller à la piscine, faire du cheval et même faire du bateau... c'est la liberté qu'ils disent...

Alors, papa Noël, j'aimerais bien que tu amènes à ma grande soeur un Tampax !

Je suis sûr que ça va lui faire plaisir... Et puis j'espère que quand je serais grand, je pourrais en avoir un moi aussi pour en profiter...

Et enfin, petit papa Noël, pour finir je voudrais un petit cadeau pour mon petit papa que j'aime. Pour mon petit papa, j'aimerais que tu lui amène une nouvelle maman... passeque depuis que la mienne elle est patie au ciel, Papa il est tout triste... Elle lui manque beaucoup je crois. A moi aussi, elle me manque...

Mais papa, lui il est pas parti mais il me manque aussi. Passeque depuis que maman elle est plus là, papa il pleure tout le temps, il boit beaucoup et il n'a plus le temps de s'occuper de nous...

Voilà, petit papa Noël, c'est tout!

Mais... si il te reste un peu de place, ze voudrais bien un petit cadeau pour moi.

Pour moi, petit papa Noël, je voudrais que tu m'apportes juste : un sourire !

Juste un sourire, que je le mette dans ma poche

Juste un sourire, et comme ça l'avoir toujours sur moi

Juste un sourire, que je puisse le mettre quand ça va pas

Juste un sourire, que je pourrais prêter à tous ceux qui sont autour de moi

Juste un sourire, papa Noël, car il n'y a rien de plus triste qu'un enfant qui ne sourit plus...

Merci, papa Noël, merci...

Vincent.

P.S. : Si tu veux pas te cramer les fesses, passe par la porte d’entrée, je la laisserai ouverte ;-)


22 novembre 2006

Je n'aurais pas du ouvrir cette porte...

Ecriture du suspens... ineventer la suite, première phrase imposée : je n'aurais pas du ouvrir cette porte...

Je n'aurais pas du ouvrir cette porte. Je le savais. Je le sentais.

Dés que mes doigts ont frôlé le métal froid et argenté de la poignée, j'ai ressenti une terrible douleur dans le bas du dos, une épée glacée qui me traversait la colonne et me transperçait l'âme. Pourtant j'ai continué. Le geste c'est fait, presque malgrè moi. Je l'ai ouverte.

J'étais prévenu mais je n'ai pas écouté. Je n'ai pas voulu écouter. Il y a des portes qui doivent rester closes. Les secrets doivent rester secrets.

Tout a commencé à l'annonce de la disparition de Suzette.
J'étais bien blotti dans mon fauteuil, celui de cuir noir près de la cheminée. Un livre me tenait lieu de somnifères. Le feu crépitait gaiement et me chauffer la pointe des pieds. Sa douceur m'encourageait à somnoler. Le temps filait doucement. Il est doux à mon âge de le laisser glisser entre ses doigts sans même chercher à le retenir.

Suzette est la femme qui s'occupe de moi. Du ménage au thé de 17h, elle est mes mains travailleuses. J'aime sa compagnie. Elle est dévouée et sait être patiente et attentive avec moi. J'avoue avoir un petit faible pour elle. Cela m'amuse qu'à mon âge je puisse m'exalter en la voyant récurer mon sol ou m'apporter mes pilules. On discute parfois, on refait le monde, enfin le passé pour moi. C'est amusant. J'ai l'impression d'être un bien vieil adolescent à côté d'une femme si jeune et si vivante.
Elle est la dernière vision féminine dans ma solitude d'ermite irascible. Depuis l'absence atroce de ma seconde femme, je n'ai pas chercher à recevoir et voir des gens. Elle, c'est les services sociaux qui me l'ont imposée. Au début cela m'énervait d'avoir cette jeunette dans les pattes. Elle me renvoyait sa fougue et sa vitalité dans mon espace de vieux débris.

Aujourd'hui je râle encore, je grince, je rouspète, mais ce sont les derniers actes amoureux que la bienséance me permet d'accomplir. Et ainsi, je ne risque ni déception, ni la paire de gifle bien placée que j'aurais certainement si j'osais explorer mes rêves d'endormi dans la vie éveillée.

J'étais donc en pleine séance de sieste littéraire quand les policiers ont sonné. Il ont répété trois fois l'horrible grincement électrique avant que je ne sorte de ma torpeur et que je m'approche de la lourde porte d'entrée. Les gyrophares jouaient avec les reflets des vitres. Des feux follets rouge et bleu.
Deux grand gaillards à l'air sévère occupaient entièrement l'embrasure de la porte. Je les fis entrer, n'entendis que d'une oreille, la plus mauvaise, leurs excuses pour cette visite tardive et je leur proposai une boisson qu'ils refusèrent.

Le silence se fit. Puis le plus ancien m'annonça d'une voix grave et sérieuse que Suzette avait disparu. Elle n'était pas rentrée pour le repas du soir chez elle et son mari s'inquiétait. Un soir d'anniversaire, cela ne se fait pas de ne pas rentrer manger ! Comme je ne suis pas joignable par téléphone, j'ai toujours eu horreur de ses appareils, le mari inquiet avait demandé si une patrouille ne pouvait vérifier sa présence d'ici à son domicile. Suzette était partie. Je ne sais à quelle heure, je dormais certainement déjà, mais assurément qu'elle n'était plus dans ma maison. Gentille elle l'est, mais pas au point de rester chez moi en dehors de son temps de travail.

Les deux policiers vérifièrent rapidement que la jeune femme ne s'était point égarée dans la maison, et constatant que j'étais seul ici, ils me posèrent de nouvelles questions.
Oui, je m'endors souvent avant son départ. Non, je ne sais pas où elle pourrait être. Oui, son absence est très étonnante, cela ne lui ressemble pas.
Oui, si j'ai la moindre idée ou information je leur ferais savoir.

Ils s'excusèrent une nouvelle fois et je les raccompagnai sur le perron. Je les suivis du regard. La voiture passa le portail et ne fut plus visible, absorbée par l'opacité d'une nuit sans lune.
En refermant la lourde porte mon inquiétude monta.

J'avais déjà connu une tragique disparition. Ma deuxième avait disparu sans laisser d'adresse. Je me revois, des heures durant, la main près du téléphone, en attente d'un éventuel appel, au moins pour une explication, un message. Ma première femme avait fuit d'une autre manière. Elle s'était suicidée. Partie un matin. Des chasseurs avaient retrouvé des parties d'elle sur la voix ferrée. On m'avait alors expliqué qu'elle avait certainement sauté du petit pont sous le passage d'un train de marchandises.
Pour la deuxième, je n'eus aucun message, aucun signe de vie ou de mort. Elle a simplement disparue.
Depuis j'ai donc vécu en ermite. Refusant que quiconque s'approche de moi. Quelque chose en moi les fait fuir...

Et aujourd'hui c'est Suzette qui disparaît !

La soirée et la nuit fut chargées de souvenirs, d'images. Mes femmes, Suzette...
Reprenons tout dans le calme.
Quand Suzette est-elle partie ? Non! Quand l'ai-je vu la dernière fois ?
On discutait. Elle était assise là, sur le sofa, moi dans mon fauteuil. De quoi discutions nous ?...
De moi. De mon passé. De mes amours. De... De ce que j'aime chez les femmes...

On est tous un peu fétichiste. Moi, j'aime les oreilles. Le dessin, la silhouette, le lobe bombée et sensuelle. Le corps d'une femme se résume à son oreille. L'oreille fine et délicate vous indique autant le caractère que l'âme de la personne. Les oreilles de ma première femme étaient belle, mais celles de la seconde étaient sublimes. J'adorais les lécher, les croquer..

Et moi, vieux pervers, j'expliquai cela à cette prude de Suzette. La lumière du feu de bois se reflétait sur son jeune visage. Les flammes jouaient avec les bijoux accrochés à ses oreilles. Ils me renvoyaient des signaux, comme un message codé que seul je pouvais comprendre.
Mes yeux ne voyaient plus que ça... Deux oreilles petites et gracieuses, certainement douces et délicates. Au bout, une pierre brillante, attirante, un phare indiquant tous les dangers du monde.
Elle est vraiment belle cette petite Suzette. Belle à ...

Et je me suis certainement endormi cette pensée en tête. Me voyant plonger, elle a du sourire et est partie. C'est t out ce dont j'arrive à me rappeler de la fin d'après midi et du départ de Suzette.

Assuré d'avoir fait le tour et de ne pouvoir rien faire de plus, j'allais monter me reposer dans ma chambre quand un petit objet brillant m'attira le regard. Je me baissai difficilement et, saisissant l'objet, le reconnu. Une boucle d'oreille avec au bout une petite pierre. Cette découverte me mit le sourire aux lèvres. Sans doute Suzette l'avait elle perdu tout à l'heure...

Je glissai l'objet dans ma poche et me dirigeai vers l'escalier.

Mais là, au lieu de gravir les marches vers un repos nécessaire, mes jambes décidèrent de descendre à la cave.

Je ne comprenais pas. Je ne voulais pas aller en bas. Qu'avais-je à y faire? Mais j'étais prisonnier de mouvements que je ne contrôlais plus. Un doute terrible me vint, remplaçant le doux sourire qui m'accompagnait. Un goût amer et glacé se logea sur mon palais. La vieillesse vous joue des tours étranges.

Cela fait des années que je ne suis pas venu dans cette cave. Depuis...

Des bouteilles de vin bien alignées présentent leurs étiquettes alléchantes. Accrochée à l'étagère, une scie attend. J'ai du l'oublier là lors des travaux d'aménagements de la cave... Juste avant la suicide de ma première femme. Elle adorait recevoir et je lui avait construit une cave à vin digne de ce nom.

Sur la gauche, un grand congélateur industriel, acheté à bas prix lors d'une vente aux enchères. Un boucher en liquidation judiciaire... Je ne m'en servais plus. Un si grand congélateur pour moi tout seul. Il faudrait que je le donne. Suzette en aurait peut-être besoin. Je lui en parlerai à son retour.

Ne comprenant pas pourquoi j'étais ici, et reprenant un peu le contrôle de mes muscles, j'allais repartir quand un bruit étrange m'arrêta. Mais, il est en fonctionnement ce congélateur !

Je ne voulais pas mais je saisi la poignée argentée de la porte. Je savais que je ne devais pas. Certains secrets de la mémoire ne doivent pas être révélés. Mais le bras droit voulu montrer ce que le gauche faisait.

Je n'aurais pas du ouvrir cette porte... maintenant je sais !

27 octobre 2006

Sous le soleil...

Petite nouvelle abandonnée... Je la reprends, la complète et espère l'éditer très bientôt sur cette page.

Cette nouvelle a germé suite à un fait divers particulier lu sur internet. Je vous mettrai le lien dès que je serais venu à bout de mon histoire. J'attends d'avoir plus avancé pour le mettre en ligne, pour ne pas gâcher la surprise sur la suite des évènements.

Voici les 4 premières parties en ligne. Elles ont été un peu remaniées, mais doivent connaître de nouveaux changements bientôt.

Partie 1
Partie 2
Partie 3
Partie 4

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